"C'est magnifique, ironise Étienne Moncel au sujet de la nouvelle réforme des retraites. 64 ans, ça fait quand même loin quand on commence à 16 ans."
Pourtant, le jeune homme de 25 ans qui travaille depuis déjà quelques mois dans l'entreprise rhodanienne Antic Mat, spécialisée en travaux de démolition, n'a pas fait grève le 19 janvier et ne le fera pas non plus mardi 31 janvier, malgré l'appel des syndicats.
Pas de mobilisation contre la réforme des retraites le 31 janvier
Même s'il se dit "complètement opposé à cette réforme", Étienne Moncel n'ira pas pour autant dans un cortège. "Ça nous touche et impacte grandement mais dans notre milieu ce n'est pas trop la mentalité. Chez les artisans et dans les PME, on n'a pas de syndicats derrière nous, pour nous pousser et nous sécuriser. Je me vois mal dire à mon patron que je ne suis pas là trois jours dans le mois parce que je me mobilise, souffle-t-il. Et puis en 40 ans, ça a le temps de changer dix fois."
Réforme des retraites : "Il est très difficile de faire grève dans les entreprises du BTP"
S'il a bonne espoir que les choses évoluent dans le bon sens d'ici la fin de sa carrière, le salarié s'inquiète tout de même. "Pour l'instant ce que je vois, c'est que petit à petit, on nous retire nos points de pénibilité. On fait partie des acteurs clé de l'économie et pourtant on ne nous respecte pas."
Le gouvernement assure néanmoins vouloir renforcer le suivi des salariés ayant des conditions de travail difficiles. Des mesures qui sont pourtant bien loin de convaincre les acteurs du bâtiment.
Dans le BTP, "flingué", avant la retraite
"Au lieu de faire une visite médicale tous les deux ans, on en fera une chaque année. Mais qu'est-ce que cela va changer ? On voit un médecin ou un infirmier, ce n'est pas obligatoire, ça dure quelques minutes pour faire juste un contrôle de routine", glisse le jeune homme. Alors oui, aujourd'hui plein de choses facilitent notre travail mais on arrive quand même bien flingué à la retraite."
Effectivement, l'espérance de vie en bonne santé des salariés du BTP est estimée à 64 ans, soit l'âge légal de la future réforme. Une situation compliquée à avaler pour beaucoup d'ouvriers. "On va trimer pour crever à peine dix années après la retraite", s'insurge le salarié.
Au final, comme pour beaucoup d'autres travailleurs, Étienne Moncel estime que la seule façon d'éviter les difficultés du métier à long terme, c'est d'évoluer. "Monter en grade est sûrement la seule échappatoire pour sortir de la pénibilité", conclut-il. Mais cette possibilité n'est pas donnée à tout le monde et beaucoup se voient obligés de continuer à travailler dans des conditions difficiles jusqu'à la fin de leur carrière.
